Voir, et être vue 2/2

Ce matin, j’ai posté sur Instagram un message reçu d’une marque avec laquelle je réalise un partenariat, en omettant de flouter mon prénom qui figurait dessus. Les plus assidu.e.s l’ont donc découvert, et j’ai reçu quelques messages. Vous étiez étonné.e.s, amusé.e.s. L’une de vous m’expliquait en riant qu’elle m’imaginait en « Emmanuelle ».

Ces échanges, provoqués par mon étourderie, m’ont rappelée à une réflexion globale sur l’intimité, qui m’avait amenée, il y a quelques mois, à fermer mon compte twitter et ma page Facebook.
J’ai rapidement rouvert la seconde, réalisant que certains préfèrent ce médium au blog, ou à IG. Je me contente donc de l’alimenter automatiquement et répondre aux commentaires qu’ils suscitent. Je ne suis réellement active que sur ce blog, où je publie trois semaines par mois, et sur Instagram, où je réalise peu à peu que se crée au fil des jours un véritable instablog. L’un et l’autre se répondent, parfois, proposent des formes d’écriture différentes.

Avec cette exposition, j’ai conscience de porter une responsabilité concrète envers mes proches. Je me suis donc fixé certaines règles auxquelles je déroge peu.

Je ne dévoile ni le prénom ni le visage de ma femme, ils lui appartiennent et elle-même a choisi de ne pas avoir de compte sur les réseaux.
Je ne trahis pas non plus le prénom de notre fille, Romy est un pseudo. Je ne veux pas prendre le risque qu’un jour, on la questionne sur tel ou tel mot de sa maman, dont elle n’est pas responsable.
Je ne relate jamais les évènements réels qui touchent mes proches de manière directe. J’ai mis, par exemple, des mois à évoquer ma nièce envolée, et je ne l’ai fait qu’une fois que ses propres parents l’aient permis.
Je ne poste pas de photographies d’autres enfants. Une fois, j’ai utilisé une image dans laquelle une voisine de ma fille passait en arrière-plan. Elle ne me paraissait pas identifiable. Sa maman, elle, l’a reconnue, et m’a gentiment expliqué qu’elle ne souhaitait pas que sa fille soit exposée. J’ai été mortifiée, je fais très attention depuis.
Je ne parle pas de mon travail, car ces deux mondes sont cloisonnés pour moi.
Et je n’utilise pas le levier de mon écriture publique pour faire passer des messages aux êtres de ma vie réelle. Mes billets sont bien sûrs nourris par ce que je vis, mais ils ne me servent pas d’intermédiaire avec mes proches.

Je tente aussi, et surtout, de maîtriser l’exposition de Romy.
Je suis une jeune maman, ses sourires et son minois lumineux me font craquer. J’ai par ailleurs et comme beaucoup suivi les formations Instagram qui préconisent de poster des portraits, car ces photographies ont le meilleur taux d’engagement. On parle ici du simple au double, on parle de méthodes qui permettent d’avoir un succès visuel immédiat, car ils font appel à l’empathie des lecteurs.
Pour autant, je n’ai pas envie d’entrer dans ce genre de stratégie.
Je ne m’interdis pas de montrer son visage, mais cela représente peu sur la totalité de mes images et celles concernées sont souvent rapidement supprimées.

Ces règles sont toutes personnelles, je ne jette pas la pierre à celles et ceux qui investissent temps et travail sur les réseaux sociaux, en vue de partenariats qui apportent un peu de confort à leurs familles. J’aurai peut-être un jour cette ambition, mais pour l’heure mes motivations sont plus simples. J’ai ouvert mon blog et mon compte Instagram par suffocation. Il m’était devenu vital de pouvoir pratiquer l’écriture, et je voulais, comme je l’ai souvent répété, créer le « grand livre de la vie de Romy ». J’imagine qu’elle lira un jour ces textes, peut-être lorsqu’elle-même deviendra maman. J’espère qu’ils lui diront mon amour infini, l’harmonie et la joie que nous tentons de cultiver pour elle.
Il ne lui diront pas, que je me suis servie d’elle pour obtenir un lectorat, ou développer des partenariats de marques que je respecte chez les autres, mais qui ne me ressemblent absolument pas.

Je veux ici laisser une trace, loin de toute consommation de son enfance.
Je suis, comme beaucoup, certains jours maladroites. Je suis aussi en recherche créative, traversée par mille questionnements. Celle d’une écriture témoignage est particulièrement présente dans mes récits, je constate qu’elle génère beaucoup de bienveillance.
Et je vous suis reconnaissante d’entrer dans cette danse, car elle est devenue le point cardinal de mon accomplissement en tant qu’autrice, souvent en tant que femme-mère-active-amie-et autres.

Écrire, est un grand travail. Je consacre du temps à ces mots, je le fais par respiration et parce que j’ai ce rêve fou d’un jour pouvoir vivre de l’écriture.
Je crois que devenir celle que je suis, fera grandir en moi la femme capable face à son miroir, la maman de Romy, l’épouse de Oumi ou encore l’amie, soeur, collègue que je suis pour d’autres. Je ne pourrais pas le faire sans vous, je dois cette re-naissance à votre accueil. Alors merci, encore une fois, à vous qui savez lire l’essentiel au-delà de mon anonymat.

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6 commentaires sur “Voir, et être vue 2/2

  1. Comment ne pas te laisser un commentaire alors que je soupçonne être, en partie, à l’origine de ce billet ? 😉 J’espère ne pas t’avoir trop déstabilisée car ce n’était évidemment pas mon intention. Tu n’es donc pas la « Emmanuelle » que j’avais imaginée lol mais reste la Manoumi dont j’apprécie tant l’écriture. Ton anonymat ne me gêne aucunement et je te trouve toujours précautionneuse lorsque tu parles de tes proches. Bref, ne change rien.

    Des bises
    Cécilia

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  2. Tes mots font écho en moi. Parfois je regrette même avoir dit à mes proches que j’avais un blog. Ce qui est ici n’a rien à voir avec l’intime, mais un besoin impérieux d’écrire… Comme mettre en lumière une relation épistolaire que l’on aurait avec soi-même, et nos enfants, peut-être, un jour s’ils le souhaitent. Je n’ai donc pas vu ton prénom, et c’est très bien ainsi :). Bises

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  3. Mettre des mots, poser des pensées et des besoins d’écriture. Je comprends bien tout cela. Je fais des choix différents des tiens concernant ce que je dévoile ou pas. C’est un sujet délicat. Je crois que tu as raison d’ecouter ce que toi tu estimes être ta limite. Et sinon j’aime toujours autant te lire. J’espère que ton rêve se réalisera

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  4. Je comprends tes choix ! Moi même je ne montre jamais mon fils ou uniquement de dos ! J’ai fait le choix de révéler son prénom c’est tout ! Même lorsque je parle d lui en tant qu’enfant extraordinaire je reste floue et je n’ai jamais mis un mot sur ce qu’il avait réellement ou non même si c’est sous entendu ! Mes proches connaissent mon blog mais parfois je le regrette car j’ai envie d’écrire sur certains sujets mais je sais que ça pourrait les blesser, je me retrouve coincée ! Par contre au travail personne n’est au courant, je ne veux pas mélanger les deux !
    Bisous

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  5. C’est très difficile de gérer cette épineuse question de l’identité sur le web. Il y a la famille, il y a le travail… Et puis, comme toi, j’ai aussi cette envie de vivre de mon écriture, et à l’heure où je parle roman, cette question de l’identité est un casse-tête…
    On n’est pas parfaites, mais avoir conscience des risques en ne se focalisant pas sur le succès et l’audience permet déjà de poser des jalons.

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